L'entonnoir de la taxe carbone
Alors que plus personne ne peut plus nier l'accélération des phénomènes météorologiques violents, sécheresse, incendie, tempêtes, inondation, ni nier le dérèglement du cycle de la faune et de la flore ; des savants fous s'agitent pour proposer des solutions pour le moins étonnantes : ensemencement des nuages pour réfracter les rayons du soleil, ensemencement de l'océan en fer, ou encore fondation d'une nouvelle monnaie basée sur la taxe carbone. Toutes ces mesures, dignes des apprentis sorciers, reposent sur une même idée "ne changeons pas le système, ne changeons pas nos modes de vie, nos pensées, notre regard sur la vie, l'homme sera sauvé par la technologie"
Avec l'idée de la taxe carbone, c'est même le marché, celui là même qui par son consumérisme effréné a mis à feu la terre qui, cette fois ci, serait à même de nous sauver. Alors voyons donc dans quel monde nous entrerons si nous acceptons les nombreuses ramifications de la taxe carbone, et en quels lieux elle a éventuellement sa place.
Les facteurs du dérèglement climatique
Cela peut paraitre bête de commencer par le commencement, mais est on certain que nous assistons actuellement à un réchauffement et non à un dérèglement climatique avec des épisodes mêlés de chaud et de froid extrêmes ? En effet la hausse des températures que nous connaissons depuis le siècle dernier s'accompagne également de records de froid dans certaines régions du globe comme au Sud du Groenland, où la température se fait chaque année de plus en plus basse, avec une tendance à l'expansion dans l'océan atlantique (notamment en Irlande) Cette tendance des températures à la baisse à gagner la France cet été. Autant l'été 2019 avait été caniculaire, autant l'été 2021 fut marqué par le froid et vécu comme un automne. Les fleurs n'ont pas eu assez de chaleur pour produire suffisamment de nectar, les abeilles n'ont donc pas pu faire suffisamment de réserve pour l'hiver et les apiculteurs devront les nourrir cet hiver. Mais que se passe t'il ? Un élément de réponse a peut être été donné par la revue scientifique Nature qui a publié deux études en 2018 affirmant la possibilité d'un refroidissement dû à l'affaiblissement du Gulf Stream (courant marin traversant la totalité des océans et jouant un rôle clé dans la régulation de la température terrestre) Plusieurs fois au cours de l'histoire de la terre, et la dernière fois il y 14000 ans, un réchauffement brutal s'est produit, suivi immédiatement d'un refroidissement de 3000 ans. En fait il semblerait que réchauffement et refroidissement soit liés dans une danse dont seule la nature a le secret.
Autre question clé qu'il convient de poser au commencement, quelle est la place exact du carbone et autres gaz reconnus à effet de serre (méthane, chlorofluorocarbures, protoxyde d'azote, ozone) par rapport à d'autres facteurs comme les effluves du soleil, les rayons cosmiques, nos propres émissions électromagnétiques sur le champ terrestre, et les modifications climatiques volontaires ?
Si les activités humaines liées à l'exploitation du pétrole et à la déforestation sont certainement les principales responsables de l'effet de serre, il convient néanmoins de ne pas fermer les yeux sur les autres co-facteurs dans le dérèglement climatique.
2. Vers un permis de polluer ?
Instaurer une taxe carbone c'est permettre de brûler du carbone contre rémunération financière. Cela signifie donc que les plus riches, particuliers ou entreprises, pourront continuer de polluer comme si de rien n'était, et que le passage aux énergies non fossiles risquent de s'étaler en longueur. Quand on possède des millions voire des milliards, on est pas à une taxe près, et on peut d'ailleurs spéculer sur les taxes pour récupérer le manque à gagner.
En 2020, en Europe, un industriel payait en moyenne 30 euros pour l"émission d'une tonne de carbone dans l'atmosphère, presque rien! Quand on sait que les entreprises les plus riches de la planète sont également les plus polluantes et qu'elles ont les moyens de payer, voici une solution idéale pour ne pas enrayer le réchauffement climatique.
Si il y a bien un endroit où la taxe carbone est légitime, et où elle devrait être élevée, n'est ce pas auprès des gros pollueurs et des multinationales qui ont les moyens de transformer positivement leur industrie ?
3. Accentuation de la fracture sociale et de la paupérisation
Le montant de la taxe est trop bas pour les industries, mais il est de plus en plus haut pour le peuple.qui le paye de manière indirecte.
Si la richesse permet de payer les taxes, alors le fossé entre les riches et les pauvres deviendra un gouffre infranchissable avec d'un côté les personnes au dessus de la nuée qui pourront continuer de vivre comme avant, et de l'autre, les classes moyennes et pauvres qui seront compressés dans le même rouleau.
Alors que le regard médiatique est actuellement tourné sur le covid, viendra le moment où celui-ci se tournera sur les catastrophes écologiques .Quand la situation climatique se détériorera et que les lois se multiplieront pour y faire face, probablement aussi durement qu'elles l'ont fait avec la pandémie, la taxe carbone sera probablement synonyme de nouvelles restrictions :
Une liberté de mouvement réduite (taxe sur les voitures individuelles, flambée du prix des voyages en avion ou en bateau), un pouvoir d'achat réduit (la taxe carbone se retrouvera dans tous les produits sauf peut être les produits de première nécessité, hausse du coût de l"énergie), des difficultés croissantes à exercer certaines professions autonomes (taxe carbone des entreprises), et à payer ses impôts (taxe carbone sur les habitations mal isolées, taxe carbone sur le nombre d'enfants, taxe carbone sur les appareils électroménagers non intelligents ou incompatibles avec la domotique..)
4 Marche forcée vers la domotique et la voiture électrique
En focalisant sur le facteur carbone et en exerçant une pression pour le mesurer dans toutes ses activités quotidiennes, la population devrait comprendre l'intérêt d'adopter des outils numériques pour avoir un mode de vie "carbonfriendly" . Des outils comme les compteurs intelligents (pour l'éléctricité, le gaz, l'eau), comme la maison qui régule le chauffage, le frigo qui sait mieux que vous quoi acheter, la voiture partagée qui sait à quel moment il est possible de proposer un covoiturage, la carte bancaire qui compte vos points carbone en fonction du caractère écologique ou non de vos achats, la machine à laver qui s'allume toute seule au moment le plus arrangeant pour votre fournisseur. Cela vous parait un peu exagéré ? Et bien je mets vous met au défi de simplement vous rendre dans un magasin et d'acheter une machine à laver le linge qui ne soit pas équipé du cloud ou du wifi. Et je pose la question, quel est l'intérêt aujourd'hui de relier une machine à laver à internet ? Et quel sera l'intérêt demain ?
Ce qui est vrai pour les appareils électroménagers l'est encore plus pour la voiture, principale source d"émission carbone. La voiture électrique est présentée comme une voiture écologique, car au moins sur le papier, elle peut être propulsée par une électricité propre. Seulement le papier et la réalité, il y a un fossé. Les voitures électriques nécessitent beaucoup plus d'énergie carbone à la production et au recyclage que les voitures standards à cause des batteries et de la motorisation. Les économies carbone ne commenceraient donc qu'à partir de 200 000 kilomètres parcourus, et ceci à condition que la batterie n'a pas déjà lâchée avant, et à condition que l'électricité provienne uniquement d'énergies renouvelables. Or c'est bien un des problèmes, rouler à l'électricité ne signifie pas rouler proprement, aujourd'hui l'électricité provient en majeure partie des centrales à charbon et du nucléaire. Nous avons donc à faire à un déplacement du problème, avec une solution qui pour le moment est encore plus polluante que la voiture classique. Les voitures électriques sont également toutes équipées en internet, ce qui n'est sûrement pas écologique, mais nous l'aurons compris, il s'agit d'un rêve ou (du cauchemar) du futur : une voiture-taxi autonome, fonctionnant grâce à l'intelligence numérique, et qui pourra se vanter d'être vraiment propre le jour où les champs d"éolienne auront remplacé les champs des vaches. Si l'on veut s'en tenir au fait, à ce jour les voitures les moins polluantes sur le marché sont les voitures équipés GPL qui permettent d'utiliser très peu d'essence.
Enfin, autre évolution sociétale probable : la fin de la propriété pour un certains nombres d"équipements. Et oui, nous produisons trop d'appareils, nous jetons trop, et tout cela crée trop de carbone. Pourquoi posséder chacun sa tondeuse, chacun son aspirateur, chacun son sèche linge, chacun sa scie rotative, et surtout chacun sa voiture ? La location est la solution carbon-friendly que les médias pourraient adorer nous vendre. On pourrait faire en sorte que les taxes ne concernent que les coûts à l'achat et que les locations soient proposées à un tarif plus qu'abordable. Ainsi la plupart des ménages consentiront à louer un certain nombre de leur appareils de seconde nécessité, reléguant un petit peu plus leur autonomie à l'état, au marché et à l'intelligence numérique, tellement plus à même de gérer leur vie.
5. La spéculation carbone
La taxe carbone a un coût qui évolue sur le marché chaque année et sur lequel il est possible de spéculer. A côté de cette taxe, les entreprises peuvent également s'échanger leurs droits carbones ou ETS (Emission trading system) c'est à dire leurs droits à polluer. Si une entreprise pollue moins que ce qu'elle avait le droit, elle peut vendre son droit à polluer aux entreprises les plus polluantes, qui elles ont besoin d'acheter de nouveaux droits.
Or comme dans tous les marchés financiers, au milieu de ces dédales et de ces complexités, il se trouve toujours des petits intelligents pour s'enrichir à partir du vide. Ainsi ce sont surtout les hedges fund, qui ont contribué en 2021 à une flambée des coûts du carbone. En 2021 nous sommes ainsi passés de 30 euros à 55 euros le coût de la tonne de C02 émise. Les hedges fund ont donc servi sans faire exprès les intérêts de l'écologie, mais ils se sont surtout servis eux même, et ont contribué indirectement à une hausse brutale des coûts de l électricité pour les particuliers. En effet le prix que les producteurs d'électricité et de gaz payent pour leurs émissions à doubler cette année sans qu'ils aient eu le temps de s'y préparer, les fournisseurs vont donc répercuter cette hausse sur la facture d'électricité et de gaz.
Le trafic monétaire lié au carbone a donné également donné naissance à plusieurs cryptomonnaies carbon friendly. Si ces initiatives restes assez discrètes, l'idée d'une monnaie carbone mondiale a déjà effleuré l'esprit de plusieurs technocrates mais sa mise en place reste aussi difficile et laborieuse que dangereuse pour les libertés fondamentales. A l'heure actuelle la mise en place d'une telle monnaie ne fait pas partie de l'horizon.
6. D'autres manières de rétablir le cycle du carbone
La taxe carbone c'est le pari de l'homo economicus, l'hypothèse que l'homme ne se préoccupe que d'argent et de consommation, et qu'il sera peu à peu réguler par le marché, à condition que le marché reste sous contrôle. Or il existe d'autres solutions simples, accessibles, tant pour absorber le carbone en excès que pour en limiter les émissions.
Pour absorber les émissions de carbone, il faut augmenter la masse végétale terrestre, à savoir premièrement les arbres, stopper la déforestation et reforester les espaces qui peuvent l'être. Les arbres sont les plus gros mangeurs de dioxyde de carbone de la planète et en échange de cette succulente nourriture, ils nous restituent de l'oxygène. Ils sont nos partenaires de respiration, ils inspirent ce que nous expirons et expirent ce que nous inspirons. Merveilleux!
En second lieu, les algues ont un pouvoir de captation du C02 beaucoup plus élevé que la plupart des plantes terrestres, elles sont même par ailleurs étudié comme des sources de bioénergie, et constituent à petite échelle de formidable dépolluants.
Enfin troisième solution, même si ce n'est pas la meilleure solution car elle pourrait légitimer le maintien de l'exploitation du pétrole, le carbone et ses dérivés peuvent aussi retourner sous terre là où ils ont été extraits. C'est ainsi que plusieurs millions de tonne de C02 ont été enfouis sous la Mer du Nord il y a déjà 25 ans, sans incident. Les pétroliers spécialisés dans le forage disposent de l'équipement nécessaire pour renvoyer le CO2 sous terre. Le C02 est enfoui dans un état supercritique, oscillant entre l'eau et le gaz. Une fois injecté en profondeur une part importante de ce carbone se minéralise en carbonate de calcium, le composant majeur du calcaire, cet additif alimentaire inoffensif que l'on retrouve dans les paquets de gâteaux. Cette solution n'est pas sans danger à cause des mouvements sismiques, mais une fuite accidentelle de CO2 dans l'atmosphère est moins problématique qu'une fuite nucléaire. Elle a le mérite d'exister et d'être une porte de dernier secours plus raisonnable que de vouloir se croire au dessus de la nature et de commencer à modifier artificiellement le climat en ensemençant les nuages ou l'océan
Quant à limiter les émissions, rien de nouveau sous le soleil, simplement un peu de bonne volonté partagée : consommer local quand c'est possible et non en provenance de Chine ou d'ailleurs, arrêter de promouvoir la société de consommation à travers la publicité, l'achat de la dernière télévision, du dernier téléphone, de la dernière play-station, diminuer le temps passer sur les réseaux sociaux et cesser d'alimenter le big data dont le coût énergétique est monstrueux, isoler sa maison, ne pas utiliser la climatisation à tout bout de champ et finir ce qu'il y a dans son frigo. En un mot, revenir à une vie un tout petit peu plus simple et un tout petit peu moins connecté.
Enfin, autre solution valable : mettre fin aux armées comme l'armée américaine qui à elle seule émet plus de gaz à effets de serre que des petits pays comme le Portugal, la Suède ou le Danemark, et qui est ni plus ni moins que le plus gros pollueur au monde. Et oui !
7. Le carbone, l'arbre qui cache la forêt
Quand on parle d'écologie on a tendance à la réduire au réchauffement climatique et à la réduire au facteur carbone, ce pourquoi on peut dire que le carbone est l'arbre qui cache la forêt.
Que l'on avance un peu plus dans cette forêt et l'on découvrira quantité d'autres problèmes en tête desquels trônent les dérivés de la pétrochimie. C'est à dire les pollutions et les attaques contre la biodiversité générées par l'agriculture industrielle, les pollutions et les attaques contre la biodiversité liées à l'industrie des médicaments, mais aussi le détournement des cours d'eau et des nappes phréatiques, l'expropriation des terres, la pollution sonore, la pollution électromagnétique, la pollution plastique
Notre modèle alimentaire et la surconsommation de viande sont également un problème central. Ils sont la cause première de la déforestation et par effet rebond une des causes du réchauffement climatique. En effet, défricher des hectares de forêts pour élever des vaches ou pour cultiver des céréales qui serviront à nourrir ces vaches c'est directement couper le poumon de la terre qui nous apporte l'oxygène et régule le carbone...
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